Le marché immobilier n’a pas atteint le creux de la vague
JUSTIN ESCALIER
Le Soleil / 3 novembre 2022 3h00 Mis à jour à 10h35
Après la surchauffe des deux dernières années, le marché de l’immobilier connait maintenant une accalmie. Ces prochains mois, l’engouement des acheteurs pour les maisons devrait continuer de diminuer, tout comme les prix, prédit un expert.
«Les biens étaient tellement surévalués ces deux dernières années que l’ajustement a été instantané dès les premières turbulences», soupire Charles Brant, directeur du service d’analyse du marché immobilier de l’association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ).
Selon l’expert, il ne s’agirait là que d’une première phase, qu’il qualifie de rattrapage car «la baisse des prix pour tous les types de biens immobiliers est pour le moment inférieure aux hausses subies depuis 2020. Donc on s’y retrouve».
Le niveau de surenchère, à la baisse, expliquerait en grande partie ce phénomène.
Le 26 octobre, la banque du Canada a annoncé une nouvelle hausse de 50 points de son taux directeur, désormais fixé à 3,75%. En six mois, ce même taux directeur est passé de 0,25 à 3,75% dans l’espoir de juguler l’inflation, qui a atteint 6,9% en octobre.
Pas encore le creux de la vague
Charles Brant reste toutefois persuadé que le creux de la vague approche.
« On n’a pas encore ressenti pleinement les effets de la hausse du taux directeur sur le marché mais on s’attend à une baisse de 10% des prix d’ici 2023 »
— Charles Brant, directeur du service d’analyse du marché immobilier de l’association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec
En cause notamment, la demande, qui a drastiquement baissé pour atteindre «un niveau comparable à 2010 ou 2011, juste après la crise immobilière de 2008» et qui devrait perdurer en 2023 car avec la perspective de récession, «il y aura moins d’achats, ce qui signifie mécaniquement une baisse des prix».
Un peu d’espoir
Mais tout n’est pas noir dans le tableau dressé par Charles Brant, qui voit dans la situation économique du Québec quelques éléments qui pourraient atténuer les craintes d’un effondrement du marché.
Avec son marché de l’emploi «en bonne posture pour encaisser le choc et éviter une récession trop sévère», son taux d’épargne très haut par rapport aux autres provinces canadiennes et une faible proportion des ménages qui ont une hypothèque à taux variable, le Québec pourrait éviter les scénarios les plus compliqués.
Paradoxalement, le déficit structurel pourrait aussi protéger le marché d’une sévère correction, d’après Charles Brant, car en limitant l’offre de biens, il va réduire le phénomène de baisse des prix, contrairement à la crise des années 1990, qui avait été précédée d’un boom de la construction.
L’immobilier de luxe épargné
Les biens immobiliers les plus onéreux sont les moins touchés que les marchés inférieurs, car les potentiels acquéreurs sont moins dépendants des hypothèques. «Sur ce type de marché, on a vu récemment beaucoup de gens capables de payer des biens de plus de 1 million de dollars en argent, sans avoir besoin d’un apport de la banque».